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TRAUMATISME – MA VÉRITÉ, PARTIE I

Il m’a fallu des mois pour écrire ce post, mais nous y sommes.


Oh, hey ! Ça va ? Aujourd'hui, je fais un post un peu inhabituel et assez inconfortable, un post que j'aurais aimé ne pas avoir à faire. Mais dans le souci de laisser mes expériences traumatisantes derrière moi et d'aider une personne quelque part à se sentir un peu moins seule, je voudrais partager cette histoire. 



AVERTISSEMENT

Ce post contient des éléments perturbants : abus sexuel sur mineure, agression sexuelle, traumatisme. Son contenu s’adresse donc à un public averti.

 

AUTRE AVERTISSEMENT

Ce post va être très long.


Okay, on y va.



SOMMAIRE




Le contexte

Si tu as lu mon autobiographie, tu sais que j'ai été agressée sexuellement dans mon enfance, et peut-être que cette nouvelle t’a choqué(e). Je suis moi-même toujours choquée d'avoir écrit cela et de l'avoir laissé là, puisque ce n’était pas le plan (du moins, pas le mien). Je me disais que ça n'avait pas d'importance. Après tout, les agressions sexuelles n'ont rien à voir avec les rêves qui deviennent réalité. Ou avec les rêves tout court. En plus, Le Livre était presque terminé (du moins, je le pensais) lorsque j'ai ajouté cette partie de mon enfance que je pensais ne jamais, jamais (jamais, mais vraiment jamais) ajouter.

 

 

Que s’est-il passé ? Qu'est-ce qui t’a donné envie de l’ajouter ?

Je n'ai jamais eu envie de le faire. Jusqu’ aujourd'hui, je suis très gênée à l'idée de savoir que le monde entier peut le lire. Ce qu’il s'est passé est qu'un jour, en novembre 2021, je me baladais tranquillement sur Instagram lorsque je suis tombée sur ce post de @igototherapy qui m'a profondément touchée.




J'ai vécu pas mal d'expériences traumatisantes à des degrés divers, que ce soit dans mon enfance ou à l'âge adulte, mais lorsque j'ai vu ce post, ce qui m'est immédiatement venu à l'esprit, c'est l'agression sexuelle que j'ai subie dans mon enfance. Jusqu'en 2021, cet événement malheureux n'était qu'un souvenir lointain, souvenir qui avait été enfoui si profondément que j'agissais comme s’il n’existait pas.


J'ai écrit la majeure partie du Livre en 2021, à compter du mois d’avril. Dès le début, je savais que je ne mentionnerais rien de cette partie de mon enfance. Je n'y pensais même pas. Je ne sais pas trop comment ni pourquoi c’est arrivé, mais ce souvenir autrefois lointain a refait surface, sorti de nulle part, et s'est progressivement frayé un chemin jusqu'au premier plan de mon esprit. Pas de flashbacks, pas de détails spécifiques, il était juste… là. Et au fil du temps, je ressentais sa présence de plus en plus grandissante.


Ça me dérangeait qu'il soit là. Ça me dérangeait encore plus qu'il semble vouloir mon attention, alors je ne lui en ai prêté aucune.


Pourquoi est-ce que ça arrive ? Pourquoi je pense à ça maintenant ? 


Il est même arrivé un moment où je m'en voulais de permettre à cette chose de prendre autant de place dans mon esprit, mais je n’arrivais pas à la contrôler cette fois. Certains jours, une partie de moi voulait que j'écrive à ce sujet, mais l'autre partie m'en dissuadait immédiatement. Qu'est-ce que ç’a à voir avec les rêves ? Ce n'était pas si grave. C'est du passé et c'est complètement hors-sujet. En toute honnêteté, je craignais aussi l'image que ça donnerait de moi.


C'est au cours des quatre derniers mois de 2021 que cette chose a commencé à m’embêter plus intensément, à tel point qu’il était de plus en plus difficile de l'ignorer. J'ai essayé du mieux que j'ai pu, jusqu'à ce que je tombe sur ce post sur Instagram et que je cède. C’était le début d'un voyage dans le passé. Un voyage qui n'était pas agréable du tout. Un voyage que je n'ai jamais voulu ou pensé devoir faire un jour.


 

Le voyage dans le passé

Parce que je ne sais pas comment structurer ce post autrement et que j'ai déjà passé trop de temps à y réfléchir, je propose que nous allions point par point comme sur l'image, en commençant par le point le plus pertinent pour moi.


Ton traumatisme est valide, même si...

  

Tu penses que d'autres personnes ont connu « pire » 

Ceci est la principale raison pour laquelle j'ai réagi comme je l'ai fait face à ce malheureux événement au fil des ans. La nature de l'agression et mon interprétation de celle-ci ont profondément affecté ma façon de penser.


J'ai passé ma vie à penser et à me dire que ce n'était « rien », qu'il y avait des gens qui avaient vécu un « vrai viol », que ce qui m’était arrivé n'était pas « si grave », qu'au moins il ne m'avait pas attachée ou fait toutes ces autres choses horribles que j'avais souvent vues à la télé ou dont j'avais souvent entendu parler. Ma définition du viol était complètement erronée. Pour moi, agression sexuelle et viol signifiaient à peu près la même chose, c'est-à-dire la pénétration par les organes génitaux uniquement. C'est tout. Je ne considérais pas tout le reste, surtout dans mon cas, comme un viol. Une agression sexuelle « générique », peut-être, mais certainement pas un viol. Si je n'avais donc pas vécu un « vrai viol », qui étais-je pour me plaindre ?


Ça aurait pu être pire. Au moins, il ne m'a pas violée. Ça n'a pas duré si longtemps. Il n’y a même pas eu de sang. Il n'est pas allé si loin.


Dans un certain sens, c'était aussi ma façon de « respecter » ce que les autres personnes, celles avaient vécu pire ou « plus traumatisant » pouvaient ressentir.


La vérité est que je n'ai jamais essayé de comprendre pleinement ce qui était considéré comme un viol, parce que j'avais peur de découvrir un jour que j'avais moi aussi été violée, ce qui est exactement ce qui s'est produit lorsque j'ai commencé à faire plus de recherches sur les agressions sexuelles et le viol, après avoir vu le post sur Instagram. J'étais bien avec mes propres définitions parce qu'elles me donnaient l'impression que ce que j'avais vécu n'était pas « un gros problème », que j’avais en fait eu de la « chance » que des choses plus graves ne soient pas arrivées.


Je me disais aussi que c’était un peu (ou beaucoup) de ma faute ; je me disais que si j'étais restée dans le salon et que j'avais continué à regarder la télé au lieu de le suivre quand il m'a appelée, rien de tout ça ne serait arrivé. Bien que ce soit vrai dans l’absolu, je ne pouvais pas savoir ce qui allait se passer. Mais je ne pensais de cette façon. Je me disais que j'aurais pu éviter ce qu’il s’était passé, surtout que ce n’était pas la première fois qu’il essayait de m’agresser.


J’aurais dû m’en douter. C’est ce que je me répétais.


Pour contexte, mon agresseur était l'un des hommes qui travaillaient chez nous. Si tu as lu mon livre ou vu les photos de mon enfance, tu sais que j'étais assez ronde quand j'étais enfant. Tu te souviens peut-être aussi des effets que mes problèmes d'image ont eus sur mon estime de moi-même. En revanche, ce que je n'ai pas mentionné dans Le Livre est que la perception que j'avais de mon corps contribuait aussi à me culpabiliser davantage.


Je me disais que si je n'étais pas si grosse, si mes cuisses étaient plus fines ou mon derrière moins rond, il n'aurait peut-être pas eu envie de me faire toutes ces choses. Encore une fois, c'était ma faute. Alors pourquoi j'allais me plaindre ?


Je ne me souviens pas qu’il m’ait menacée de ne rien dire, mais je n’en ai parlé à personne. J'ai simplement arrêté d’aller jouer dans le jardin, attendant avec impatience le jour où il finirait par arrêter de travailler chez nous.

 

Les recherches que j'ai effectuées ont duré de novembre 2021 à mai 2022 environ. Je ne les ai pas effectuées tous les jours, mais j'avais dix-huit millions quatre cent soixante-seize mille neuf cent trente-deux onglets ouverts portant sur les agressions sexuelles. Sans blague, j’ai compté (😉). Ces onglets ont fait planter mon ordi un nombre égal de fois avant que je ne les mette sur une liste de lecture, pour quand je serais prête à ne plus faire comme s’ils n'existaient pas. Mais ce n’est pas ce qu'il faut retenir.


Ce qu'il faut retenir est qu'il m'a fallu du temps pour me faire à l'idée de ce que je lisais. Au début, je ne voulais pas croire que j'avais été violée. Je n'arrêtais pas de vérifier, de regarder encore et encore, essayant de trouver des sources plus fiables que le site des Nations Unies qui ne qualifieraient pas de viol ce que j'avais vécu.

 

« Le viol est toute pénétration vaginale, anale ou orale non consensuelle d'une autre personne avec une quelconque partie du corps ou un objet quelconque. »

 

Une quelconque partie du corps ? Non non, je ne peux pas avoir été violée. C'était « juste » des doigts. Ça ne peut quand même pas être considéré comme un viol ! Ce n'était pas si grave. Ouais, agression sexuelle, mais viol ?! Je ne pense pas. Peut-être que c'était « juste » une agression sur mineure ? C’est quoi une agression sexuelle sur mineure ? Ou alors c’étaient des attouchements sexuels ? C'est plus plausible. Mais quelle est la différence ? 

Je me suis demandé, allant d'un article ou d'un site à l'autre, refusant d'accepter ce que je lisais. Je ne voulais pas avoir été violée, et bien que de nombreux pays et même des juridictions à l'intérieur des pays semblent avoir des interprétations différentes de ce qu’est une agression sexuelle, la plupart des définitions du viol que je trouvais m'amenaient à la même conclusion.


Ce n'est pas que je me considère comme étant « au-dessus » de certaines choses, absolument pas ! Les difficultés de la vie ne font pas de discrimination, je ne le sais que trop bien. Je ne voulais simplement pas faire face aux sentiments associés à cette découverte.

 

Tu ne t’en souviens pas très bien

Je n’arrive pas à (ou peut-être qu'une façon plus juste de le dire est que je ne veux pas) me souvenir exactement de ce qui s'est passé. Au cours des mois qui ont suivi l'agression et jusqu'à quelques années plus tard, j'avais des flashbacks çà et là, mais je les mettais toujours de côté et tournais rapidement la page, surtout avec ma perception de la situation. Il est fini par arriver un moment où je ne me souvenais absolument plus de rien, comme si ce n'était jamais arrivé.

Qui ? Moi ? Agressée sexuellement ? Lol. Tu parles de quoi là ? Bye !

 

Tes symptômes ne ressemblent pas à ceux d’une autre personne

Quels symptômes ? En grandissant, je me souvenais de moins en moins de cet évènement et il ne m’affectait plus vraiment. Je dis « plus vraiment » parce qu'il arrivait que j'écoute certaines histoires ou regarde certaines scènes de films qui me rappelaient cet évènement, mais comme je ne le prenais pas au sérieux, je réprimais toujours les émotions qui voulaient surgir.


Ce n'est qu'après avoir vu le post Instagram et en effectuant mes recherches que j'ai commencé à avoir des flashbacks plus vivaces. Pour la première fois depuis des années, je me suis souvenue d'être allongée sur son lit, de ressentir la douleur et l'inconfort de ce qu’il se passait. Je me suis souvenue d'avoir vomi et d'avoir dû me brosser les dents un million de fois parce que quelques minutes plus tôt, il avait enfoncé sa langue dans ma bouche et j'avais dû la mordre pour qu'il me lâche. Je me suis souvenue des nausées que j'ai eues les jours suivants, du fait que je n'arrivais pas à manger parce que tout se répétait dans ma tête. Et ce n'est qu'à ce moment-là, des années plus tard, que je me suis souvenue que ça avait fait mal, que ça avait en fait été douloureux. Parce que je ne considérais pas ça comme un « vrai viol », j'ai aussi réussi à convaincre mon corps qu'il devait être capable de supporter ce qu’il s’était passé.


Au cas où tu te poses des questions sur « son lit », il y a une chambre dans la dépendance de notre maison, et cette chambre était habituellement occupée par toute personne qui travaillait sur les parties extérieures de la maison, surtout s’il s’agissait d’un homme. Dans ce cas-ci, il s’agissait du jardinier. Je suppose que l'idée était de séparer les choses afin d'éviter que des événements malheureux se produisent... 

 

Ça s’est produit il y a des années

C’est le cas. Encore une fois, je ne peux pas dire avec précision l'année exacte où ça s'est produit, mais j'avais 9 ou 10 ans. Ou peut-être j’en avais 8 ? Je ne sais pas.


Comme tu le sais peut-être aussi, ma foi compte beaucoup pour moi et c'est une chose sur laquelle j'ai appris à m'appuyer au cours des dernières années. Donc lorsque cette chose a commencé à me déranger et qu'elle est devenue plus difficile à ignorer, j'ai prié. Mais la vérité est que je voulais surtout que Dieu la fasse disparaître et qu'Il s'en tienne au plan sur lequel nous nous étions mis d’accord au départ. Je me suis dit que j’en ferais mention dans Le Livre s'Il le voulait vraiment, tout comme je me suis dit que je ferais ce post s'Il le voulait vraiment, mais j'espérais qu'Il ne le veuille pas.


S'il te plaît, ne me force pas à faire ça. Je n'étais pas censée parler de ça. Je ne veux pas en faire mention, s'il te plaît. C’est ce que je me suis dit, lorsque j'écrivais cette courte phrase sur l'agression dans mon livre pour la première fois. (D'ailleurs, la toute première version disait quelque chose comme « J'ai été sexuellement agressée dans mon enfance et même si ce n'était pas un viol, les choses qu'il m'a faites m'ont fait me sentir mal dans ma peau. »)


C'est tellement hors-sujet. Aucun rapport avec rien du tout. Je ne peux pas garder ça ici. 

J'ai surligné cette phrase en rouge et je me suis dit que ce n'était qu'un bouche-trou que j'enlèverais lors de mes dernières révisions. Et voici où nous en sommes. Ah... les choses que je ferais pour Dieu. C'est pas génial ? Je pense que c'est super ! J'adore ! Youpi !


Bref... donc ouais, ça s’est passé il y a des années.

 

Ça ne t'a pas rendu plus « fort(e) » 

C'est vrai. Mais ça ne m'a pas rendue plus faible non plus, parce qu'encore une fois, au fil des années, j'ai réussi à tout oublier et j’allais parfaitement bien, ou du moins je le pensais. Mais qu’en est-il de lorsque je m'en suis souvenu, tu poses la question ? Excellente question ! En toute honnêteté, j'avais... honte. Quand j'ai lu tous ces articles sur le viol et que je ne voulais ou n’arrivais pas à croire que ça m'était arrivé, la première chose que j'ai ressentie a été la honte.


Je suis certaine d’avoir pleuré à ce sujet pendant mon enfance, mais tellement d'autres facteurs contribuaient à mon mal-être, facteurs que je considérais même comme étant plus importants. C'est en janvier 2022 que j'ai pleuré pour la première fois uniquement à cause de l'agression. Il y avait de la honte, il y avait du déni, il y avait de l'inconfort, il y avait des flashbacks. Il y avait tellement de « Pourquoi maintenant ? », tellement de « J’allais bien », tellement de « Tout allait bien », tellement de « Je ne comprends pas ».

J'étais en colère. J'étais triste. J'avais honte. Je me sentais impuissante.

  

Il t’a fallu du temps pour réaliser que c'était un traumatisme

Absolument ! Encore une fois, c'est le post sur Instagram qui m'a fait réaliser que c'était un traumatisme. J'avais appris à vivre ma vie comme si rien ne s'était jamais passé, mais quand j'ai vu le post, la seule chose qui m'est venue à l'esprit était l'agression.

 

Tu n'en as parlé à personne

En quelque sorte. J'en ai parlé de manière très légère à deux amis quand j'étais au collège et à un autre quand j'étais à l'université, mais j'ai toujours pris soin de préciser que ce n'était pas un « vrai viol ». J’en ai aussi brièvement parlé a quelqu’un l’année dernière. La première fois que j'en ai vraiment parlé, c'est quand j'ai commencé la thérapie en juillet 2022.


Une autre raison pour laquelle je ne voulais pas écrire à ce sujet, c'est que je ne l'avais jamais dit à ma maman, et je me sentais mal de le lui faire découvrir pour la première fois dans un livre.

 

Quelqu'un a pensé que ce n'était pas grave

Il s'agit de moi. Quelqu'un, c'est moi. Je suis quelqu'un.

 

Ça ne t'affecte plus vraiment

En grandissant et en réussissant à oublier, je n'ai pas vu d'impact particulier sur moi, ce qui est une autre raison pour laquelle je ne voulais pas en parler au départ. Cependant, lorsque j'ai commencé à faire des recherches et que j'ai découvert le véritable nom de ce que j'avais vécu, tout a changé.


Lorsque j'ai recommencé à y repenser, notamment en évitant tous ces articles, cette chose me hantait et me dérangeait. Au départ, j'étais surtout confuse et mal à l'aise (très, très mal à l'aise). Puis c'est devenu un peu plus sérieux. Mes recherches ont mis mon monde sens dessus dessous et j'ai commencé à me sentir triste. Ça a également affecté ma confiance en moi d'une manière que je n'aurais pas cru possible. J'étais gênée, me demandant parfois si les gens pouvaient deviner que j'avais été agressée sexuellement simplement en me regardant ou en me parlant. Plusieurs fois, j'ai souhaité ne pas avoir vécu ça. Plusieurs fois, j'ai souhaité ne jamais m'en être souvenue. Plusieurs fois, j'ai souhaité être... normale. Plusieurs fois, j'ai souhaité ne pas être aussi brisée...


Je me souviens avoir passé quelques heures un soir devant le miroir, dans ma chambre dans la maison sur Dalton Road. J’étais assise sur le bord de mon lit, à me regarder et à penser à toutes sortes de choses. Je me sentais... bizarre et... tachée et... abîmée. Pas seulement à cause de l'agression, mais aussi à cause de tout ce que j'ai vécu. J'avais l'impression que c'était beaucoup, trop peut-être, et je ne savais pas comment me sentir. J'avais l'impression que tout ce que je savais de moi avait été anéanti. J'avais l'impression que tout ce que j'avais accompli ne signifiait plus rien. J'avais l'impression d'avoir fait semblant d'être quelqu'un que je n'étais pas.


Et pendant un moment, j'ai eu l'impression que les décisions que j'avais prises par rapport à mon corps, les choses que je m’étais dit que je ferais et surtout celles que je ne ferais pas (sans rapport avec l'agression), n'avaient plus d'importance ou de sens. Ça ne veut pas dire que j'allais renoncer à ces décisions. Absolument pas. Mes décisions sont toujours d’actualité, mais je voudrais être honnête et reconnaître l'impact que le fait de donner son vrai nom à l'agression a eu sur moi, même si je sais aujourd’hui que ça ne me définit pas et que c'est simplement une partie de mon histoire.


Ça ne m'affecte plus vraiment, mais je suis encore en train de guérir. Même après avoir commencé la thérapie, j'ai continué à avoir du mal à ne pas m'en vouloir.


— Répète après moi : « Ce n'est pas ma faute. Je n'ai rien fait de mal », m’a dit mon thérapeute la première fois que nous en avons parlé.

— Ce n'est pas ma faute... ai-je chuchoté, ...mais j'aurais dû savoir, ai-je continué après quelques secondes de silence. Je n'aurais jamais dû y aller. Pourquoi je ne suis pas restée sur place ? Ce n'était pas la première fois. J'aurais dû savoir ! J'aurais dû savoir !


Ce n'était pas la première fois qu'il essayait de me toucher. Ce n'était pas la première fois qu'il essayait de m'embrasser. Ce n'était pas la première fois qu'il essayait de me faire d'autres choses. Ce n'était pas la première fois qu'il m'attirait dans son lit.  Je ne me souviens pas combien de fois ça s'est produit ni pendant combien de temps. Ce jour-là, par contre, c'était la première fois qu'il avait réussi l'une des autres choses avant que je ne m'échappe.


J'aurais dû savoir.


Mon thérapeute a eu beau essayer de m'expliquer que c'était mon cerveau adulte et plus mature qui analysait maintenant la situation, je ne pouvais pas me résoudre à dire que je n'avais rien fait de mal du tout. Il m'a aussi dit que si je n’arrivais pas à me souvenir de plusieurs choses, c’est parce que mon cerveau avait utilisé un mécanisme de défense pour me protéger du traumatisme, un processus appelé amnésie dissociative.


Je n'avais pas réalisé à quel point il me faudrait du temps pour traiter cet événement et les émotions qui y sont associés, mais comme pour toute autre chose dans ma vie, je prendrai mon temps et je continuerai à travailler pour aller mieux.

 

 

Réflexions finales

La légende du post résume assez bien les choses : « Un traumatisme est un traumatisme. »  Peu importe ce qui l'a causé, peu importe quand ça s'est produit, peu importe ce que toi ou quelqu'un d'autre en pense, et que tu en sois conscient(e) ou non, si tu as vécu un traumatisme, quel qu'il soit, il est valide et tu mérites de guérir.


J’aurais souhaité que personne ne se reconnaisse dans cette histoire. J’aurais souhaité que personne n'ait vécu d’expériences similaires ou plus graves. J’aurais souhaité n’écrire ce post pour personne d'autre que ma plus jeune Moi. J’aurais souhaité que dans ce cas, une personne quelque part n'existe pas. Mais je sais qu'elle existe, et mon cœur se brise à l'idée que nous sommes si nombreux(ses). Trop nombreux(ses).


Si les sujets liés à la violence, aux traumatismes et à la santé mentale en général, sont de plus en plus abordés, il reste encore beaucoup de chemin à faire. C'est particulièrement le cas dans ma culture, où ces sujets sont soit considérés comme tabous, soit carrément ignorés. Pis encore, la violence et les abus contre les femmes sont souvent normalisés et intériorisés, les « bonnes femmes » et les « bonnes épouses » étant celles qui les supportent.


Attendre qu'il devienne « approprié » d’aborder ces sujets ne m’a pas vraiment réussi jusqu’ici, alors je pense que je vais essayer quelque chose de différent.

 


À une personne quelque part...

Qui et où que tu sois, si tu t’es reconnu(e) même juste un tout p’tit peu dans mon histoire, plus que jamais, j'espère que tu te sens moins seul(e). J'espère que tu réalises à quel point ce que tu as vécu est grave, même si tu penses que c'est « rien » ou que c’est « insignifiant ». Mais s'il te plaît, ne commets pas la même erreur que moi en n’en parlant pas. Je ne dis pas d'écrire un livre ou de partager ton histoire sur internet (à moins que tu en ressentes le besoin), mais ne laisse pas ça à l’intérieur de toi. Ça peut t’affecter d'une manière dont tu ne te rends pas compte.


Autant j’ai détesté que ce souvenir revienne me hanter, autant je suis contente que ça ait été le cas pour que je puisse le traiter. Et même si je sais à quel point il semble plus rassurant et « probablement mieux » d'ignorer ses émotions, j'espère que lorsque les tiennes referont surface, tu pourras t'arrêter et également les traiter. Parce qu'elles finiront effectivement par refaire surface. (Quelqu'un m'a dit que ses souvenirs étaient revenus trente-six ans après l'événement traumatisant.) Et plus important encore, si tu en as la possibilité, s'il te plaît, va en thérapie.


Hey. Ce n'est pas ta faute. Tu n'as rien fait de mal. Quelqu'un a profité de toi.

Ça ira.

Prends ton temps.

Guéris.

 

 

Liens utiles

Ce serait maladroit de terminer ce post sans fournir quelques ressources, alors en voici :

 


À propos du consentement et de la coercition sexuelle

Pour les adultes (puisque les enfants ne peuvent pas donner leur consentement), j'aimerais partager quelques informations sur le consentement et la coercition sexuelle.


ONU Femmes définit le consentement comme suit :

« Non c’est non. Oui c’est oui. Le consentement est un accord entre les participants pour s'engager dans une activité sexuelle ou se marier. Il doit être donné librement et activement et ne peut être donné par une personne sous l'influence de drogues ou d'alcool ou par une personne mineure. Le consentement est spécifique, c'est-à-dire que le consentement à un acte n'implique pas le consentement à d'autres actes, et réversible, c'est-à-dire qu'il peut être révoqué à tout moment. »

Mots clés : à tout moment. Avant, pendant, ou même après.

 

Voici le point de vue d'Educaloi sur le sujet :

« Consentir à des attouchements sexuels, c’est donner clairement son accord à une activité sexuelle par des paroles ou des gestes. Selon cette définition, si une personne garde le silence ou ne fait rien, elle ne donne pas son accord à une activité sexuelle. Une personne peut donner son consentement et changer d’avis. À partir de ce moment, c’est comme si la personne annulait son consentement. »

 

Ce que dit la Police d'Edmonton :

« Rappelez-vous que NON c’est NON, même si l'autre personne : dit oui, mais change d'avis. Vous a embrassé(e) ou s'est livrée à une certaine forme d'activité sexuelle. A déjà eu des relations sexuelles avec vous. A consommé une substance intoxicante et semble consentante. Porte des vêtements provocants. »

 

Et au sujet de la coercition sexuelle, le Bureau pour la santé des femmes indique qu'il s'agit d'une « activité sexuelle non désirée qui se produit après avoir subi des pressions non physiques, notamment :

- Être épuisé(e) par une personne qui demande des rapports sexuels de façon répétée.

- On vous a menti ou on vous a promis des choses qui n'étaient pas vraies pour vous inciter à avoir des rapports sexuels.

- Une personne menace de mettre fin à une relation ou de répandre des rumeurs sur vous si vous n'avez pas de rapports sexuels avec elle.

- Une figure d'autorité, comme un patron, un gestionnaire immobilier, un agent de crédit ou un professeur, use de son influence ou de son autorité pour vous pousser à avoir des relations sexuelles. »


« Dans une relation saine, vous n'êtes jamais obligé(e) d'avoir des contacts sexuels si vous ne le souhaitez pas. Un contact sexuel sans votre consentement est une agression. » (!!!)

Et ce, que vous vous voyiez simplement, que vous soyez dans une relation engagée ou que vous soyez mariés. L'intimité physique, sous toutes ses formes, sans consentement est une agression. Point final.

 

Oh, et une dernière chose : les gens sont libres de donner ou de refuser leur consentement à une activité sexuelle. Qu'ils aient été agressés par le passé ou non, et que leurs décisions soient motivées par un traumatisme ou non, ils devraient pouvoir disposer de leur corps comme ils l'entendent sans avoir à justifier leurs choix. Si chaque personne est libre de faire ce qu’elle veut de son corps, elle peut aussi choisir ce qu'elle ne veut pas en faire. L’un des choix n’est fait plus librement que l’autre. Aucune source, c'est juste moi qui le dis.


Okay, maintenant j'ai fini. Reste en bonne santé physique et mentale.


 

Câlins,

Danielle

 

 

 

LHDLP



Cette chanson m'a également inspiré ce post. Comme je l’ai dit dans cette histoire derrière La Playlist, avant 2022, elle ne me rappelait que les moments où j’étais dans la douleur ou traversais une période difficile, mais où je disais que j'allais bien. Ce n'est qu'après avoir entrepris le voyage dans le passé qu'elle a commencé à me rappeler d'autres choses et m'a encouragé à écrire ce post.


Une autre chanson liée à cet évènement est celle-ci. Ci-dessous, ce qui n’a pas été intégré à son histoire.


Hiver 2022. Après avoir passé des années à ne pas me l’admettre, j'ai fini par comprendre que j'ai été violée dans mon enfance. Un soir, je suis assise devant mon miroir et je pense à toutes les choses que j'ai vécues. J'ai honte. Je me sens abîmée. Ça fait beaucoup. Je ne sais pas vers qui me tourner. Les jours suivants, lorsque j'écoute cette chanson, je me rappelle une fois de plus que Lui seul sait ce que j'ai traversé. Que malgré mon histoire qui me semble parfois trop lourde à porter, Il ne m'abandonnera jamais.


Paroles clés

You keep a cover over every single secret

Tu recouvres chacun de tes secrets

So afraid if someone saw them they would leave

Tant tu as peur que si quelqu'un les voyait, il partirait

For the lonely, for the ashamed

Pour les solitaires, les honteux (honteuses)

The misunderstood, and the ones to blame

Les incompris(es), et celles et ceux qui sont à blâmer

What if we could start over?

Et si nous pouvions recommencer à zéro ?


Mots clés : honte, solitude.

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